Gabino Iglesias « Santa Muerte »

Court roman, surprenant, bref et incisif comme un coup de couteau dans le bide asséné au détour d’une rue sombre.

Le premier roman de Gabino Iglesias, culturiste d’origine portoricaine installé à Austin, est une sorte de “pulp fiction” violente, version latino, ambiance Amours chiennes de Alejandro González Iñárritu. Le gang de tarés qui opère dans ce roman est au moins aussi maboule que celui qui officie dans l’excellent Satan dans le désert de Boston Teran (2019, Gallmeister).
Fernando est un immigré mexicain clandestin vivant à Austin. Il travaille comme videur dans un night-club et deale pour le compte du caïd local. C’est loin d’être un tendre, mais d’un autre côté, ce n’est pas un mauvais bougre, il est croyant, ce qui lui permet d’avoir bonne conscience en s’en remettant à la statuette qui trône chez lui, la protectrice “Santa Muerte”. Ce pauvre Fernando se fait enlever par des dégénérés mentaux tatoués de la tête aux pieds. Il ne les connaît absolument pas. Il ne les a jamais vus. Des flingués du bocal qui le conduisent dans une maison vide en banlieue où il retrouve un collègue ligoté sur une chaise, dealer pour Guillermo comme lui. Le chef des cramés du bulbe lui explique qu’il va le relâcher pour qu’il aille signifier à Guillermo qu’il doit abandonner le territoire de centre-ville, là où le bizness est le plus florissant et, pour qu’il comprenne bien de quoi ils sont capables, ils torturent son collègue de manière affreuse devant lui jusqu’à le décapiter au couteau. Fernando va rendre compte à Guillermo qui en a vu d’autres des petits branleurs qui essaient de l’impressionner pour l’écarter. Le caïd recommande à Fernando de faire appel à quelques “nettoyeurs” contre rémunération pour s’occuper de ces Latinos tatoués jusqu’aux oreilles. Dont le Russe. Rien ne l’arrête celui-là. Pourtant, pour la première fois, il coince. Il revient vite vers Fernando en lui recommandant de se tirer d’Austin au plus vite avant que les autres abrutis ne le chopent, il n’a jamais vu des mecs aussi tarés. Mais Fernando n’a pas dit son dernier mot.

On retrouve dans Santa Muerte une atmosphère de pègre sicilienne version latino. Guillermo est un gangster à l’ancienne, avec une sorte de code d’honneur, alors que les nouveaux venus ne sont pas du genre à négocier, ils sont plutôt adeptes de la terre brûlée pour s’emparer d’un territoire avec des manières pas très orthodoxes, je te prie de croire. À lire avec une photo de Sainte Rita à proximité.

Gabino Iglesias Santa Muerte Sonatine
180 pages, 20,00€

Patrick Foulhoux

Ancien directeur artistique de Spliff Records, Pyromane Records, activiste notoire, fauteur de troubles patenté, journaliste rock au sang chaud, spécialisé dans les styles réputés “hors normes” pour de nombreux magazines (Rolling Stone, Punk Rawk, Violence, Dig It, Kérosène, Abus Dangereux, Rock Sound…), Patrick Foulhoux est un drôle de zèbre.

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