Jello Biafra & The New-Orleans Raunch and Soul All-Stars « Walk On Jindal’s Splinter »

Walk on Jindals Splinters
Les Louisianais Bill Davis et Fred Le Blanc (du groupe Dash Rip Rock) ont proposé à Jello Biafra de se joindre à eux pour interpréter des standards rhythm’n’blues du terroir à l’occasion d’un festival jazz à la Nouvelle-Orléans. Un one-shot. Le groupe au nom à rallonges, aux tiroirs de côté et au fixe-toit comprend également d’autres notoriétés locales comme Pepper Keenan de Corrosion of Conformity, Pete Wet Dawg Gordon de Mojo Nixon qui connaît bien Biafra pour avoir déjà enregistré avec lui, et les sections cuivres d’Egg Yolk Jubilee et de Morning 40 Federation, des formations locales renommées à Crescent City. Il ne restait plus qu’à transbahuter le concert en disque et, sous la pression populaire, Biafra a fini par le sortir sur son label.

En guise de warm-up, l’album décolle sur “Ooh Poo Pah Doo”, un tube rhythm’n’blues de 1960 du Néo-Orléanais Jessie Hill avant d’embrayer sur “House of The Rising Sun” des Animals. Ils enchainent avec le potache “Don’t Mess With My Toot Toot” du Louisianais Sidney Semien, un morceau un peu grivois sur les bords, me semble-t-il ! Même les Fats Domino l’ont reprise. En poursuivant dans le répertoire rhythm’n’blues local, ils passent la notoire “Mother-in-Law” d’Allen Toussaint au gabarit. “Bangkok” d’Alex Chilton (décédé à la Nouvelle-Orléans en 2010) avant la célèbre “Judy in Disguise” que John Fred composa en 1967 pour se moquer de “Lucy in the Sky with Diamonds” des marioles de Liverpool. Après ça, ils escaladent un monument local de 1966, “Working in a Coal Mine” de Lee Dorsey.
Biafra et ses costauds en rendent une respectueuse copie comme s’ils n’avaient osé lui rentrer dans le lard (Biafra – lard – humour). Toucher un morceau pareil, c’est risquer de l’altérer. La déjantée “Land of 1000 Dances” de Wilson Pickett précède celle que tout le monde attend, la reprise de Dr John. Ils auraient pu opter pour un titre plus funky vu la formation, ils ont préféré la possédée “Walk On Guilded Splinters” tirée du chef-d’œuvre Gris-Gris (Atlantic, 1968) pour faire couleur locale vaudou. Dr John est natif de la Nouvelle-Orléans, Biafra du Colorado, quand dans la chanson ils prononcent en français dans le texte « je suis le grand zombie » chacun de leur côté, l’accent de Biafra est moins marqué que celui de Dr John. La horde s’en prend ensuite à “Fannie Mae” de Buster Brown qui fut numéro 1 en 1960, un rhythm’n’blues voltigeur. Il monte à la verticale, puis il coupe les gaz pour tomber en chute libre avant de laisser aux cuivres le soin d’exercer une poussée de bas en haut à filer le vertige. On n’est plus à ça près, il y a un moment qu’on a le tournis. Une enivrante “Just a Little Bit” de plus ou de moins en fin de disque, ça ne changera rien à la montée d’adrénaline. “Just a Little Bit” est un titre de 1959 de Rosco Gordon — le pianiste qui inventa un style de jeu à son nom — repris par Elvis et même par les quatre malandrins de Liverpool, ce morceau donc, achève les derniers danseurs qui traînent sur la piste. Jello Biafra & The New Orleans Rauch & Soul All-Stars revisitent le répertoire local — ou des titres en lien avec la Nouvelle-Orléans — avec une énergie débordante, à la façon d’un Barrence Withfield & The Savages ou d’un King Khan & The Shrines avec grosse formation rhythm’n’blues derrière. On pense aussi aux New Yorkais des Raunch Hands ou des Lost Crusaders. La Nouvelle-Orléans est décidément bien le berceau de la musique qui nous anime !

Jello Biafra & The New Orleans Raunch and Soul All-Stars
Walk On Jindal’s Splinters Alternative Tentacles
Site web de Alternative Tentacle

TRACKLIST

Ooh Poo Pah Doo (de Jessie Hill)
House of The Rising Sun (des Animals)
Don’t Mess With My Toot Toot (de Sidney Semien)
Mother-in-Law (d’Allen Toussaint)
Judy in Disguise (de John Fred)
Working in a Coal Mine (de Lee Dorsey)
Land of 1000 Dances (de Wilson Pickett)
Walk On Guilded Splinters (de Dr John)
Fannie Mae (de Buster Brown)
Just a Little Bit (de Rosco Gordon)
Bangkok (d’Alex Chilton)

Patrick Foulhoux

Ancien directeur artistique de Spliff Records, Pyromane Records, activiste notoire, fauteur de troubles patenté, journaliste rock au sang chaud, spécialisé dans les styles réputés “hors normes” pour de nombreux magazines (Rolling Stone, Punk Rawk, Violence, Dig It, Kérosène, Abus Dangereux, Rock Sound…), Patrick Foulhoux est un drôle de zèbre.

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