Nick Cave & The Bad Seeds « Henry’s Dream »

Henry's Dream

Nous sommes en 1992 quand Henry’s Dream -septième album de Nick Cave et de ses mauvaises graines- voit le jour. Deux ans après The Good Son (1990, Mute), sur lequel le chanteur australien semblait apaisé et amoureux, Henry’s Dream débarque comme son exact contraire: violent, viscéral, noir et particulièrement Rock ‘n’ Roll.

A la fin des années 80, Nick Cave, tombe sous le charme de la styliste brésilienne Viviane Carneiro et décide de changer de vie. Une énième cure de désintox’ et un déménagement à São Paulo plus tard, l’Australien s’est refait une santé, au grand dam d’une partie de ses fans, qui ne sauront apprécier que bien des années plus tard le chef d’œuvre faussement calme The Good Son.
Là-bas, le chanteur australien passe le plus gros de ses journées dans des troquets à écrire, tout en s’inspirant des musiciens de rue qui entonnent leurs chansons, grattant leur guitare de fortune avec rarement plus de deux cordes.
Ces street beggars posent les fondements de ce qui deviendra Henry’s Dream, Un disque de Delta Blues sec, rythmé par de violentes guitares acoustiques. Pour les textes, Cave, fidèle à lui-même, s’inspire comme souvent de quelques écrits bibliques qu’il mêle à de sombres histoires d’amour, de passion ou de meurtres. Tout au long des neuf titres qui composent le LP, qu’on pourrait presque qualifier d’album concept, on y fait la rencontre de plusieurs personnages, qui se croisent au fil des chansons.

L’ambiance est électrique, et dès les premières notes de l’apocalyptique « Papa Won’t Leave You Henry », la tension s’installe et ne lâchera aucun titre, pas même les plus calmes (« Christina the Astonishing » ou la ballade « Straight to You ») jusqu’au final en apothéose: « Jack the Ripper ». Nick Cave n’a jamais aussi bien chanté, mais passe le plus clair de son temps à raconter ses sordides histoires d’une voix hargneuse et fiévreuse, tel un prêcheur sudiste. Les Bad Seeds complètent le tout avec des chœurs scandés, flirtant parfois avec le Gospel (l’intro de « I Had a Dream, Joe »).
La production, signée de l’Américain David Briggs -célèbre pour ses travaux au coté de Neil Young– fait la part belle aux prises live du groupe, qui détestera le résultat final. Elle a pourtant le mérite de rendre l’ensemble plus spontané, plus Rock ‘n’ Roll, sale et brutal. Un choix qui colle à merveille avec les thèmes de l’album.
Comme toujours, chaque Bad Seed a un rôle bien défini et rien n’est laissé au hasard. Le fidèle Mick Harvey est à la six cordes acoustique ou à l’orgue ; Blixa Bargeld tire quelques sons stridents de sa guitare électrique, Thomas Wydler martèle littéralement ses fûts, tandis que Martyn P. Casey à la basse, et Conway Savage aux claviers font discrètement le job, s’assurant une place à long terme chez les Mauvaises Graines.

Henry’s Dream est l’un des rares albums des Bad Seeds qui divisent autant. Le groupe lui-même le rejette -affichant clairement leur désaccord face à une production qu’ils n’assument pas et allant même jusqu’à en remixer une partie- tandis que les fans l’adorent. Reste un disque majeur dans la discographie du groupe, marquant par ses titres et par l’atmosphère qui s’en dégage.

Nick Cave & The Bad Seeds Henry’s Dream Mute Records

TRACKLIST:

Side A

Papa Won’t Leave You Henry
I Had a Dream, Joe
Straight to You
Brother, My Cup Is Empty
Christina The Astonishing

Side B

When I First Came to Town
John Finn’s Wife
Loom of the Land
Jack The Ripper



Album disponible sur Apple Music, Qobuz, Spotify & Tidal,
mais aussi et surtout, chez tous les bons disquaires indé’ !





Stéphane Pinguet

Disquaire indépendant aigri mais passionné, amateur de musique, cinéma, littérature et bandes dessinées en tous genres.

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