Simon Reynolds « Hardcore »

Tous les ouvrages du journaliste britannique font référence et celui-là ne déroge pas à la règle quand bien même le sujet est, cette fois, à des années-lumière de mes préoccupations musicales. La techno, moi, tu sais… Ouais, mais racontée par Simon Reynolds, tout de suite, ça donne envie.

J’avoue que tout ce qui touche à la techno et aux musiques électroniques ou apparentées, à de rares exceptions près, je m’en contrecarre dans les grandes largeurs. Je suis allergique. Mais racontée par Simon Reynolds, j’écoute, ou plutôt, je lis, en cherchant des rapprochements avec des musiques qui me concernent plus. Ce livre est un recueil d’articles publiés dans la presse britannique pour expliquer les origines de la techno spécifiquement britannique tout en la disséquant de façon chirurgicale. Peut-être de manière un peu trop érudite. Quand on n’est pas familier avec les spécificités techniques de la discipline, il est parfois difficile de saisir où veut nous emmener l’auteur des excellents Rip It Up & Start Again (Allia, 2007), Retromania (Le Mot et le Reste, 2011) ou bien encore Le choc du glam (Audimat Éditions, 2020) qu’il faut avoir lus. C’est la dimension sociologique que je recherchais dans Hardcore. Et là, je n’ai pas été déçu. Simon Reynolds explique dans ses articles publiés à partir de 1992 que la techno est mise au ban de la société par le milieu rock qui use des mêmes arguments qu’on utilisait autrefois à son encontre pour l’ostraciser. Son argumentaire se tient hormis à le pousser dans ses derniers retranchements et établir que la techno utilise finalement, point par point, les mêmes arguments que le rock pour se défendre à son âge. Au final, et c’est une thèse que je défendais déjà il y a 25 ans en pleine explosion de la techno, si vous m’autorisez cette digression, cette discipline ne fait qu’emprunter très exactement le même raisonnement que le rock pour expliquer son cheminement, son authenticité et son originalité. Selon moi, dans quelques décennies, les disques de techno seront un département de plus dans les rayons rock aux côtés du reggae, de la pop, du folk, de la country ou du punk. Je vous donne là un avis personnel probablement pas partagé par l’auteur. Ce recueil d’articles est aussi l’occasion de lire des chroniques des disques essentiels de la discipline. Simon Reynolds a le don pour traiter des sujets à la marge de la marge de façon originale, il ne fait jamais dans la facilité et c’est en cela qu’il est probablement un des journalistes – auteurs les plus passionnants du moment.

Simon Reynolds Hardcore Audimat Éditions
(279 p., 20 €)

Patrick Foulhoux

Ancien directeur artistique de Spliff Records, Pyromane Records, activiste notoire, fauteur de troubles patenté, journaliste rock au sang chaud, spécialisé dans les styles réputés “hors normes” pour de nombreux magazines (Rolling Stone, Punk Rawk, Violence, Dig It, Kérosène, Abus Dangereux, Rock Sound…), Patrick Foulhoux est un drôle de zèbre.

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