Le chanteur des Cadavres et sa compagne signent un recueil de poésie sociale qui offre une vision du monde peu réjouissante, certes, mais incontestablement réaliste.
Le titre La morsure du quotidien convient parfaitement au sérum distillé par ce livret à la très jolie maquette parcheminée. Noël vu par les auteurs, ça casse la magie, je te prie de croire. Pour dire combien leurs centres d’intérêt sont divers et variés. Eux-mêmes sont pétris de paradoxes et en sont parfaitement conscients. Petit extrait pour cerner leur état d’esprit :
Suis végan deux jours par semaine, je mange sans gluten mais ça veut dire quoi déjà ? Je boycotte le Nutella à cause de l’huile de palme dont les plantations nuisent fortement à la survie des Grands Singes.
Je boude une marque mais je continue à changer de portable tous les six mois. Normal, pas de reportage choc sur les pillages des mines de nickel, de cuivre, d’or… composants essentiels de nos compagnons du désastre.
Nul ne peut se targuer d’échapper aux ramifications de la société de consommation. Alors on se console avec des actions qui sont autant de crachats dans une mer polluée. (…)
Nous apportons notre pierre à l’édifice qui n’est rien d’autre que notre propre caveau.
Certes, la formule est lapidaire, mais si bien imagée qu’elle n’ait besoin de note en bas de page. Ces 26 textes courts sont presque tous de même humeur, il n’y a ni colère, ni haine, juste un implacable constat. Les auteurs ont passé l’âge de rêver, ils ne sont pas là pour donner des leçons ou faire la morale, ils ne sont pas fatalistes, simplement réalistes. La maquette du livre est illustrée par de belles enluminures qui donnent un aspect encore plus solennel aux textes. Chaudement recommandé.
Philippe Vérole & Lyssa L. La morsure du quotidien Mort Lente/Guerilla Asso/Valice Productions/Marchando Producto
45 pages, 8 €
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