Rock en Seine 2017, à cheval entre indépendant et grand public.

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Pour son quinzième anniversaire, le festival parisien Rock en Seine a frappé très fort. Sa prog’ parvenait à mêler des concerts grand public (The XX, Franz Ferdinand, P.J. Harvey ou…Jain) à de l’indépendant (Ulrika Spacek, Car Seat Headrest, Sleaford Mods, Frustration…) marchant même par moment sur les plates-bandes de La Route du Rock. Aperçu d’une belle série de concerts -qui nous valut d’arpenter le parc de Saint-Cloud en long, en large, et en travers- pour 16 prestations qu’il ne fallait pas rater!

Vendredi 25/08

Frank Carter & The Rattlesnakes: Mauvaise nouvelle, la pluie décide de s’inviter dès la 1ère journée, rendant le site boueux. On se console d’entrée avec Frank Carter et ses Rattlesnakes. Malin, l’ancien hurleur en chef de Gallows a compris qu’il ne remplirai pas son compte en banque en faisant du Hardcore toute sa vie. Il lance alors le temps d’un album Pure Love puis revient sous son nom aux cotés des Rattlesnakes. Le résultat est moins violent que chez Gallows, et surtout, plus Pop. Sur la grande scène, Carter est à sa place. Il conquiert les foules avec des chansons Heavy Rock bien foutues, mais sacrément FM. On sent que le rouquin anglais n’est pas loin de remplir les stades…

Cabbage: Frank Carter et et ses potes nous ont donné envie de guitares. On se laisse porter jusqu’à la scène Cascade pour y retrouver les jeunes Mancuniens de Cabbage. Belle surprise, le groupe anglais -qui compte visiblement dans ses influences les Fall de Mark E. Smith– font le boulot, malgré un léger manque de charisme (surtout du côté des musiciens…). On se penchera sérieusement sur leur dernier EP (Uber Capitalist Death Trade).

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At The Drive-In par Olivier Hoffschir ©

At The Drive-In: Étonnant de la part de l’équipe de Rock en Seine de placer la mythique formation Post-Hardcore sur la Grande Scène…et en plein après-midi qui plus est. Leur set est aussi génial que chaotique et c’est en grande partie dû à l’imprévisible chanteur Cedric Blixer-Zavala. Pas dénué de charisme, ce dernier tente les pires acrobaties imaginables, oubliant souvent de se concentrer sur le chant, au détriment d’un Dennis Lyxzén (Refused). Le groupe, impeccablement mené par le génial guitariste Omar Rodríguez-López, fait un peu remonter le navire à la surface pour quelques moments de grace.

Jesus and Mary Chain: Après des années passées à donner des concerts courts, intenses et violents, tout en se mettant régulièrement sur la gueule, les frères Reid (William et Jim) ont bien vieilli et se sont calmés. Pour leur deuxième passage au festival en dix ans, le groupe donne un set absolument imparable, bourré de vieux tubes comme de plus récents, extraits du pourtant moyen Damage & Joy -à qui on donnera une seconde chance- mais surtout des grands classiques Psychocandy (1985) et Darklands (1987). William balance dans son coin ses impeccables riffs bruyants tandis que l’élégant Jim est vissé au micro, arborant une posture qui en a certainement inspiré plus d’un (Matt Berninger des National en tête). Assurément LE meilleur concert de cette première journée de festival!

Allah-Las: On retrouve les Californiens de Allah-Las au meilleur moment: en milieu de soirée sur la scène du Bosquet. Le groupe nous ramène au milieu des 60’s et, en bons hippies, les musiciens partagent les instruments comme les parties chants. Le public est bercé de belles mélodies Pop Surf tout droit venues du Summer of Love. Les morceaux n’ont rien de bien original en soi, mais ils ont le mérite d’être joué par un groupe appliqué, qui prend (au moins) autant son pied que les spectateurs.

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The Shins par Christophe Crenel ©

The Shins: Le choix était épineux pour le dernier concert de la journée. Les Shins ou les Black Lips? Pop/Folk ou Garage/Punk? C’est la formation de James Mercer qui l’emporte et l’on se félicite rapidement de ce choix, tant le groupe est diablement efficace sur scène. La bonne humeur de Mercer et sa bande, palpable et communicative, nous met rapidement dans le bain. Toujours plus convaincant sur scène que sur disque (les Shins ont toujours eu tendance à en faire des caisses sur album), on a droit ce soir à un véritable best-of, des tubes à la pelle (« Kissing the Lipless », « Phantom Limb », « Simple Song » et bien sur « Caring is Creepy » et « New Slang »). Une belle manière de conclure cette première journée, des étoiles dans les yeux…

Les fails du jour: Le Heavy Rock FM insipide des Pretty Reckless, L’Electro-R&B mollassonne de Flume et…avoir été forcé de lâcher la Pop des Écossais de Franz Ferdinand (pourtant diablement efficace) pour courir découvrir les Hippies d’Allah-Las.

Samedi 26/08

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Lysistrata par Olivier Hoffschir ©

Lysistrata: Samedi, une des premières surprises de la journée sera le trio Lysistrata. Le jeune groupe français est à la fois violent et intense, et navigue entre un Math-Rock précis à la Papier Tigre et Post-Hardcore façon La Dispute. Une belle claque comme on en voit rarement dans ce genre de festival. Tellement bluffant, qu’on en oublie complètement les poids lourds anglais Band of Horses qui se produisent au même moment sur la Grande Scène… On attend avec impatience The Thread, le premier album du trio, prévu pour l’automne chez Vicious Circle.

Girls in Hawaii: La Pop des Belges fait retomber un peu la tension du coté de la Cascade, et l’on se dit que le groupe, dont on est déjà fan, s’en sort bien mieux en soirée et dans une vraie salle de concert. Leur set efficace fait la part belle à de nouveaux titres (étonnamment plus dansants) extraits de Nocturne (album prévu pour la fin du mois), tout en comptant quelques vieux tubes, dont « Found in the Ground », single sorti il y a tout juste 15 ans.

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Her par Olivier Hoffschir ©

Her: La semaine passée, le duo Her a tragiquement perdu l’un des leurs, le talentueux Simon Carpentier. Il s’agit aujourd’hui de leur premier concert sans lui.
On les avait croisés plus tôt cette année à La Coopérative de Mai de Clermont-Ferrand, ce qui nous avait permis de saisir l’étendue de leur talent. En cette fin d’après-midi, l’ambiance est électrique, et le groupe, mené par Victor Solf, entame un hommage poignant à son ami, tout de noir vêtu. Le deuil vécu par le groupe, associé au soutien d’un public chaleureux, donne un courage fou au groupe rennais qui offre un concert tout simplement renversant . On ne pouvait pas rêver de plus bel hommage!

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P.J. Harvey par Christophe Crenel ©

P.J. Harvey: Une des principales raisons de notre venue au festival, et certainement celle de milliers de festivaliers: P.J. Harvey. Plus tôt dans l’après-midi, c’est Antoine Wielemans de Girls in Hawaii qui nous avait chaudement recommandé de ne pas rater son set.
Bien que seule son nom figure sur le programme, la chanteuse est comme toujours bien entourée. Polly Jean débarque sur la Grande Scène au côté de Mick Harvey (ancien Bad Seeds/Birthday Party), James Johnston & Terry Edwards (Gallon Drunk), Alain Johannes (Eleven/Queens of the Stone Age) ou encore le fidèle John Parish, pour ne citer qu’eux. Le groupe investit la scène à la manière d’une fanfare et entame un « Chain of Keys » bluffant. Une introduction qui force le respect.
Alors que certains festivaliers curieux (et fin saouls) venus pour faire la fête comprennent que le concert risque de sérieusement les ennuyer, P.J. et les siens continuent d’interpréter avec classe folle leur répertoire, composé en grande partie des plus récents albums d’Harvey (Let England Shake de 2011 et The Hope Six Demolition Project » de 2016). Le set est millimétré, Polly Jean, belle et gracieuse, ne laisse rien paraitre. Chacun de ses gestes est précis, presque théâtral, on est à mille lieux de la P.J. Harvey Rock ‘n’ Roll des débuts, à l’époque de Dry (Too Pure, 1992) il y a maintenant 25 ans!
L’Anglaise et son groupe n’en oublient pas les vieux fans, et interprètent quelques classiques réarrangés, dont « 50 Ft Queenie », « Shame », « Down by the Water » et « To Bring You My Love ». Le set, d’une élégance rare, se termine par un nouvel extrait de son dernier album, « River Anacostia ». P.J. et son groupe se retirent devant une audience conquise.

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Sleaford Mods par Olivier Hoffschir ©

Sleaford Mods: Idéalement placé en fin de soirée, le duo de Nottingham se produit devant un public déjà conquis sur la petite scène du Bosquet. Jason Williamson et Andrew Fearn livrent un concert sans fioriture, à la frontière du Hip-Hop et du Punk. Williamson crache littéralement ses lyrics tout en gesticulant/mimant ses textes pendant que Fearn lance ses beats sur son laptop (posé, s’il vous plait sur trois caisses de Heineken) tout en…buvant des bières et remuant la tête. Pas de folie non plus niveau éclairage ou mise en scène. Comme quoi, quand on est bon, nul besoin d’en faire des caisses !

Les fails du jour: Un seul bémol à cette seconde journée, rater les excellents Frustration qui se produisent en même temps que P.J. Harvey…mais ce n’est que partie remise!

Dimanche 27/08

King Khan & The Shrines: Là encore, la question se pose: Pourquoi placer ce vieux baroudeur de King Khan et ses fidèles Shrines -inconnus du grand public- en ouverture de la Grande Scène le dimanche aprèm’ ? Autant envoyer le charismatique rockeur canadien au casse-pipe…Mais bon, il en faut bien plus pour détrôner le roi et pour King Khan, qu’il s’agisse de 30 000 spectateurs ou de 200 (comme c’est le cas ici), le show sera le même… Et quel putain de concert Rock ‘n’ Roll! A la fois drôle et sexy, il met littéralement le public en transe. On a tout d’un coup envie de se replonger dans les albums du chanteur, sorti chez In The Red, Voodoo Rhythm et Merge entre 2000 et 2013.

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Car Seat Headrest par Olivier Hoffschir ©

Car Seat Headrest: On était déjà fan de Teens of Denial (sorti en 2016 chez Matador) et de ses performances scéniques captées ça et là sur Youtube, autant dire que l’on était déjà conquis en arrivant sur la scène de la Cascade. Malheureusement, Will Toledo et sa bande souffrent d’un son franchement pas terrible. Le jeune phénomène de l’Indie Rock U.S. fait quand même le job et s’en sort pas si mal, mais donne envie de le revoir dans de meilleures conditions, hors festival par exemple.

Slowdive: Culte pour beaucoup, et complètement ennuyeux pour les autres. Voilà les réactions que l’on entend régulièrement sur ces rescapés des années 90. Fraichement reformé donc, Slowdive a signé au printemps dernier chez Dead Oceans un très chouette album éponyme et livre ce soir un beau set intense qui fait tomber follement amoureux du groupe (pour peu que l’on ait bu la bière de trop). Les couches de guitares se superposent et le chant de Rachel Goswell et Neil Halstead font toujours autant d’effet, tout comme « Alison », tube en puissance composé il y a maintenant de 24 ans.

Cypress Hill: Déjà programmé en 2010, les légendaires Cypress Hill prouvent une fois de plus qu’ils sont toujours au top! Tous sont désormais proches de la cinquantaine, mais n’ont rien perdu de leur flow d’antan et ce malgré quelques beaux échecs discographiques. B-Real, Sen Dog, Dj Muggs et Eric Bobo foutent une ambiance de feu sur la Grande Scène, alors que le public scande les tubes, dont l’indémodable « How I Could Just Kill a Man? ». On ne s’en lassera donc jamais…

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Ty Segall par Olivier Hoffschir ©

Ty Segall: Habitué du festival, Ty Segall revient cette année avec son groupe, non pas pour défendre son album éponyme sorti en début d’année, mais son tout nouvel EP prévu pour début septembre chez Drag City. Un mini-album que les Californiens joueront en intégralité, tout en piochant dans l’énorme discographie du prolifique musicien (et il y a de quoi faire). La bande prend toujours autant son pied sur scène, et la bonne humeur est communicative. A voir et (re)voir, encore et encore…

Les fails du jour: XX rassemble désormais les foules, on est loin de leur premier album, minimaliste. Le trio n’a pas grand intérêt sur scène mais rend complètement fou son public…étrange. Deuxième phénomène qui déçoit: les Lemon Twigs. Malgré un sacré charisme et du talent à revendre, les deux frères sonnent comme une énième copie de Bowie, des Who ou de n’importe quel groupe/artiste culte des 60’s. Là encore, sans grand intérêt… Enfin, rater le Villejuif Underground -dernière signature Born Bad Records– était l’une des erreurs de la journée. On se rattrapera lors de leur tournée automnale.

Festival Rock en Seine (vendredi 25, samedi 26 et dimanche 27 août 2017)
Domaine National de Saint-Cloud.
Photos par Christophe Crenel et Olivier Hoffschir.
Promotion: Ephélide / Chakalaka


Rock en Seine 2017 en vidéos (par Culturebox)

 



Stéphane Pinguet

Disquaire indépendant aigri mais passionné, amateur de musique, cinéma, littérature et bandes dessinées en tous genres.

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