Crocodile Boogie « A Family Affair »

Seb Blanchais, l’homme aux multiples casquettes, sommité rock rennaise s’il en est, fait une petite infidélité à ses Head On de cœur pour régler ses affaires de famille. Crocodile Boogie est son nom de DJ à la base. À l’aide de copains, tel Gil Riot, il met au point un disque loin des giclées électriques auxquelles il nous a habituées depuis longtemps avec ses différents groupes supersoniques pour un disque d’une grande sagesse en commençant par la pochette, mais néanmoins un album swamp rock sous tension.

En traversant A Family Affair une première fois, d’une traite, une question vient à l’esprit, le chanteur – disquaire – label manager rennais ne serait-il pas atteint du syndrome Tex Perkins ? Ne serait-il pas touché par la grâce divine du rock’n’roll tout puissant ? Crocodile Boogie s’affiche sur la pochette avec son fiston, Jim, qui donne aussi le titre de la première chanson. Jim qui a lui-même dessiné la horde d’alligators au dos de la pochette. La façon de Crocodile Boogie d’aborder les dix chansons fait penser, selon les tonalités, au Gun Club, à Chicken Snake, à Beasts of Bourbon ou, cela va de soit, aux Stones. Cette histoire de famille signifie qu’il a assemblé autour de ses propres titres, des reprises en lien avec des souvenirs particuliers ou en hommage à des amis. Parmi les reprises, se trouve un morceau de Johnny Cash, “This Town”, “Comfort of the Devil” des Dogs d’Amour, “The Day Marty Robbins Died” des Beasts of Bourbon et des Johnnys et “What’s It Gonna Be” de Neil Diamond. Quant à “Jim”, Crocodile Boogie a adapté les paroles de Billie Holliday à sa propre musique. Un titre à double lecture ; c’est soit l’histoire d’un voyou, soit celle des liens qui unissent un père ou une mère à leur fils. Le disque baigne dans la moiteur du sud, dans les marais infestés de moustique et d’alligators, avec les porcs qui se roulent dans la fange, là où les granges abritent des distilleries clandestines et où la gnole rend aveugle, le genre d’endroit dont on revient toujours avec trois dents cassées et une gueule de bois carabinée. Pas question d’aborder A Family Affair en se balançant sur un rocking-chair en fumant la pipe et en attendant des jours meilleurs, il incite à relever les manches et à se cracher dans les mains pour en être au risque de regarder passer la diligence et de venir plus tard se plaindre qu’on a loupé le coche.

On espère que Crocodile Boogie pourra aller défendre son disque sur scène, les reptiles ne lui font pas peur, alors les virus à la con, hein…

Crocodile Boogie A Family Affair Beast Records

Face A

Jim
This Town
Comfort of the Devil
Some Things
Corkscrew

Face B

Once Again
The Day Marty Robbins Died
Sour and Vicious Man
What It’s Gonna Be
Most of the Time



Patrick Foulhoux

Ancien directeur artistique de Spliff Records, Pyromane Records, activiste notoire, fauteur de troubles patenté, journaliste rock au sang chaud, spécialisé dans les styles réputés “hors normes” pour de nombreux magazines (Rolling Stone, Punk Rawk, Violence, Dig It, Kérosène, Abus Dangereux, Rock Sound…), Patrick Foulhoux est un drôle de zèbre.

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