Mogwai joue « Atomic » à La Cité de la Musique.

Affiche du festival Days Off
La cité de la musique, version institutionnelle.

D’entrée, une étrangeté : l’interdiction stricte de pouvoir ramener un quelconque souvenir du ciné­concert sous forme de vidéo ou photo. Je ne crois pas avoir vu une seule fois un portable pointer la lumière de son écran dans le public (et j’étais plutôt au fond). Des lieux culturels comme cela existent encore, à l’heure où des groupes plutôt bien établis invitent eux­-mêmes le public à enregistrer, diffuser. Peut­-être qu’une ministre de la culture pourrait accidentellement aller y prendre une photo un de ces quatre pour que ces règles changent ? Mind the gap, please.

Deuxième étrangeté : assis tu seras, bouger tu ne pourras pas. Ok on est à un ciné­-concert mais quand même c’est un concert de Mogwai. L’impossibilité de pouvoir le vivre debout, (à peu près) en rythme avec la musique m’a personnellement bien frustré, n’étant pourtant pas du genre à sauter dans la fosse. C’était un peu comme de se retrouver avec une camisole. Tout le monde ne l’a certainement pas vécu comme cela mais ce public était statique ­ comme dans statue, ou statut ­, bof bof. Bref drôle de codes et drôle d’ambiance. Je me demande si les conditions sont les mêmes pour chaque projection, ailleurs.

Atomic de Marc Cousins

Affiche du documentaire Atomic: Living in Dread and Promise de Mark Cousins.

De statique à extatique.

Voilà pour le contexte, entrons le vif du sujet. Dès les premières images, un indice : le groupe est, lui aussi, assis. La place est donnée toute entière à l’écran. Deuxième indice : tiens donc, ils sont 5 sur scène mais il n’y a qu’un guitariste (Stuart Brathwaite) et deux musiciens à l’électronique. En vrai le «remplaçant » de John Cummings fera des allers-retours de son clavier à la guitare, il sera d’ailleurs le seul à rester debout avec sa Telecaster, pour envoyer les watts. C’était écrit dans la chronique : la programmation est l’épine dorsale de l’album. Enfin la B.O. En fait, les 2. Et c’est aussi vrai en live.
Ce qui frappe d’entrée ­ au­-delà du son assez exceptionnel, il faut le noter ­ c’est la sorte de dialogue qui s’instaure entre les morceaux et les images. À ce moment là on réalise à quel point le groupe a effectivement créé de concert avec Mark Cousins. Parlons des images : de l’archive à tout va, des plans très courts qui se succèdent et reviennent alternés de plans plus longs d’interviews. Et l’album qui ne se déroule pas de manière linéaire mais qui se retrouve complètement fragmenté, métronomique et irradiant comme une seul homme avec le montage. La set­list qui aurait du/pu être : Ether/Scram/Bitterness centrifuge/U­235/Pripyat/Weak force/Little boy/Are you a dancer?/Tzar/Fat man devient quelque chose comme : Ether / Fat Man / Scram / Fat Man 2 / Bitterness Centrifuge / U­235 / Pripyat ­ No Drums / Weak Force / Pripyat / Little Boy / Roof / Are You A Dancer? / Tzar / Fat Man 3.

Revenons sur les images : Atomic le film est un putain de brûlot politique, bien plus qu’une posture écolo-­simpliste sur le nucléaire si l’on s’arrête à l’album. Tout y passe : le scientifique, le politique, le mensonge d’état, le peuple victime, le peuple bourreau et, au final, le sentiment que le sujet d’Atomic est in fine celui de l’indépendance. Une grosse claque, gargantuesque, presque inattendue mais en même temps tellement logique : « science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».

Tout est dans le big bang.

Après une heure de ce visionnage édifiant ­ presque d’horreur, un peu comme la projection imposée au personnage d’Alex dans Orange mécanique de Kubrick ­ et alors que le générique de fin commence à dérouler après une série de magnifiques images d’éruptions solaires, tout s’accélère et la rage à peine déjà contenue est balancée au public engoncé dans ses fauteuils. Je ne sais pas à combien de db le son est monté à cet instant ultime ­ Stuart Braithwaite enfin debout avec sa guitare ­ mais le fait que l’on ait
été sidérés à ce moment­-là ne se discute pas. Comme un big bang de la Scottish guitar army, ni plus ni moins, dans la gueule.

Pour avoir vu Mogwai en live un certain nombre de fois depuis 16 bonnes années déjà (avec le côté blasé/vieux con que cela peut induire), croyez­-moi cet Atomic là est un chef d’oeuvre, incomparable et formidable. Après cela, tout peut s’arrêter.

Salle: La Cité de la Musique
Site web de Mogwai et de leur label Rock Action.



Critique de la bande originale du documentaire Atomic,
et du side-project éponyme de Stuart Braithwaite Minor Victories.

Atomic  minor victories pias slowdive mogwai editors 2016

Rodolphe Canale

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