Joyliner « Check Your Pulse »

Joyliner appartient à une caste en voie d’extinction et non pas en extinction de voix, celle des groupes qui conservent leur ligne artistique tout au long des années malgré une forte houle incitant à surfer des ondes plus clémentes. Qu’importent les intempéries stylistiques, Joyliner garde son cap pop punk d’obédience Midwest sans jamais défaillir.

Joyliner n’est pas le seul à procéder ainsi. Depuis des décennies, les Burning Heads ou Dead Pop Club pour n’en citer que deux n’ont rien changé à leur hygiène de vie. S’il leur venait l’idée saugrenue de virer brusquement de bord au premier gros grain,
leur public les lâcherait en plein triangle des Bermudes. Depuis 1995, Joyliner évolue, progresse, entretient et améliore même sa pop mélancolique acidulée et veloutée. Comme d’habitude, le quatuor a enregistré ce huitième album au Black Box à Noyant-la-Gravoyère, ce qui convient parfaitement à son teint hâlé. Check Your Pulse s’élance sur une ligne bien connue, presque convenue. Il faut avancer dans le disque pour voir le groupe se détendre du manche et orner ses mélodies de belles guirlandes harmoniques pour des morceaux ravissants, parfois même surprenants. Le détonnant “Bad Dancers, Unite” sonne comme “Almost Nothing” de
Shredded Ermines. Pour “Back”, on retrouve une rythmique, une basse et une ligne vocale identiques à celles des Thompson Rollets. Le quatuor a même des penchants psychés par moments. On perçoit de-ci de-là des élans fougueux façon Swervedriver. Pour dire que Joyliner voyage bien, peu importe les océans. C’est tentant de rapprocher vaguement le quatuor – et pas que pour le nom – des Écossais de Joyrider, un groupe qui ne fit pas long feu dans les années 90. Joyliner a cette faculté caméléonesque d’adapter sa morphologie au sens qu’il veut donner à ses chansons, des chansons qui, en guise de sens, n’en ont pas toujours ou alors, pour suivre, va falloir explorer le labyrinthe neuronal du chanteur sans oublier de dérouler un fil d’Ariane pour retrouver la sortie. Je dois avouer que j’ai peiné à entrer dans le disque, ayant l’impression de l’avoir déjà vécu mille fois au siècle dernier, obnubilé que j’étais à l’époque par les productions des labels comme Crank, Jade Tree, Doghouse, Dischord, B-Core, Revelation, Art Monk Construction et bien d’autres encore.
Finalement, Joyliner se hisse au niveau des grands noms ayant vu le jour dans ces petites auberges soigneusement bien tenues. Le quatuor ne cultive pas la nostalgie pour autant, il regarde devant et si sa façon de faire n’est plus beaucoup représentée en Europe, elle trouve toujours des adeptes outre-Atlantique puisque Bob Mould, Get Up Kids ou Jimmy Eat World sont toujours en activité, preuve qu’il existe toujours un marché à prendre et que l’heure de Joyliner pourrait bien arriver puisqu’il semblerait que les sonorités 90’s reviennent progressivement en cour.

Joyliner Check Your Pulse Autoproduction

Face A

Call Us
Surface Scratcher
Cringe
Touchstone
Bad Dancers, Unite

Face B

There
Brace
Late
I’m OK
Back


Album disponible sur Bandcamp, Qobuz Spotify,
mais aussi et surtout, chez tous les bons disquaires indé’ !

Patrick Foulhoux

Ancien directeur artistique de Spliff Records, Pyromane Records, activiste notoire, fauteur de troubles patenté, journaliste rock au sang chaud, spécialisé dans les styles réputés “hors normes” pour de nombreux magazines (Rolling Stone, Punk Rawk, Violence, Dig It, Kérosène, Abus Dangereux, Rock Sound…), Patrick Foulhoux est un drôle de zèbre.

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