Peter Perrett « How The West Was Won »

Peter Perrett "How The West Was Won"

Quand les Only Ones sont passés au Rat Pack à Clermont-Ferrand le samedi 6 juin 2009, Peter Perrett ne semblait pas au mieux de sa forme. C’est le moins qu’on puisse dire. Mais étonnamment, sa voix était intacte. Et là, miracle, le revoilà contre toute attente pour un premier album solo brillantissime.

J’y allais avec des pincettes vu son état lors de son dernier passage en ville. Soit il allait m’endormir, soit il allait me foutre une branlée olympique. Il ne faut jamais désespérer avec ce type de personnage. Sainte Rita veille toujours auprès de Sainte Cécile en cas d’urgence.
Je ne suis pas fan des Only Ones à la base. J’avais privilégié Special View (Epic, 1979) à The Beat (CBS, 1979) du Paul Collins’ Beat pour des raisons de budget. Je l’ai longtemps regretté. Les Only Ones ne me parlaient pas. Trop Velvet Underground pour moi, pas assez rock, pas assez punk. The Clash était passé par là et avait refait les niveaux de l’ado de 17 ans que j’étais. Fallait que ça secoue du genou et que ça rigole de la guibole. Seule “Another Girl Another Planet” m’hypnotisait avec sa mélodie douce amère et sa voix laidback et fragile. Un modèle d’écriture. J’aurais pu me contenter du single. Encore eusse-t- il fallusse que je susse qu’il y en eusse un !
Bref, cette chanson m’a collé à la peau et je n’ai jamais réussi – ni tenté d’ailleurs – de m’en défaire. Après, le reste du répertoire m’ennuyait, c’était limite du remplissage. Mais ça, c’était avant que j’éduque mes oreilles. J’ai appris à apprécier plus largement les Only Ones même si leur ton froid ne m’éveille ni fougue ni passion. Un plaisir gourmet plus que gourmand.

Il me faut généralement un temps d’adaptation surtout avec un lourd passif et des aprioris tenaces, mais là, d’entrée avec la “How the West Was Won” qui reprend là où Lou Reed a cessé, j’ai mordu immédiatement. J’ai posé les pincettes pour prendre l’album à bras-le- corps. Un machin pareil, c’est inenvisageable. Des qui se prennent pour Lou Reed ou qui font comme, il y en a des chiées, mais des qui l’incarnent au point de l’égaler voire de le doubler par la gauche, tu peux chercher un moment. L’âme de Lou Reed a donc trouvé refuge chez Peter Perrett. Un mimétisme pareil, c’est troublant combien même Peter Perrett a toujours creusé ce sillon. Avec “An Epic Story”, il revient aux Only Ones avant de fureter du côté de Green On Red de Chuck Prophet et Chris Cacavas, un tantinet REM ce qui l’éloigne un peu de Lou Reed avec lequel il partage les mêmes convictions vocales mais pas à la même hauteur. Perrett met sa voix en danger. A 65 balais, continuer à faire l’équilibriste à 50 mètres du sol sans filet, c’est culotté. Il serait plus simple de rester proche du plancher des vaches et de ratisser large. Perrett aime les challenges jusqu’à balancer une “Man of Extremes” qui sonne comme une version velvetienne de “Fallait pas commencer” de Lio. Tu te dis qu’arrivé là pour lire une connerie pareille, ça sent le traquenard organisé, ça foutrait presque les chocottes, j’en conviens. C’est pour ton bien, pour te sortir de ta torpeur. Peter Perrett n’a pas viré neurasthénique. Il est léger, presque vaporeux. Pour te dire le fond de ma pensée, avec le panel de tonalités proposé, cet album oscille entre Lou Reed et Big Ray. Démerde-toi avec ça.

How the West Was Won est aussi important que les American Recordings de Johnny Cash. Johnny Thunders n’est plus, Lou Reed n’est plus, qu’importe, Peter Perrett tient le cap avec ce sublimissime How the West Was Won.

Peter Perrett How The West Was Won Domino Records

TRACKLIST:

Side A

How The West Was Won
An Epic Story
Hard to Say No
Troika
Living in my Head

Side B

Man of Extremes
Sweet Endeavour
C Voyeurger
Something in my Head
Take me Home



Album également disponible en écoute sur Spotify par ici.




Patrick Foulhoux

Ancien directeur artistique de Spliff Records, Pyromane Records, activiste notoire, fauteur de troubles patenté, journaliste rock au sang chaud, spécialisé dans les styles réputés “hors normes” pour de nombreux magazines (Rolling Stone, Punk Rawk, Violence, Dig It, Kérosène, Abus Dangereux, Rock Sound…), Patrick Foulhoux est un drôle de zèbre.

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