Fucked Up « One Day »

Ayant d’autres chats à fouetter, j’avais quelque peu délaissé les Canadiens. Je les retrouve en pleine forme avec ce nouvel album sorti chez Merge, leur nouvelle auberge, qui se trouve être aussi celle de Bob Mould, ça tombe bien… Ce One Day a de franches aptitudes power pop punk, ce qui n’est pas pour me déplaire.

C’est curieux chez les punks rockers, ce besoin de gueuler… Faut que Damian Abraham braille, quoi qu’il advienne, quoi qu’il arrive, en toutes circonstances. Il ne peut pas s’en empêcher, c’est plus fort que lui, même si derrière ça s’applique, ça joue harmonieux. Faut bien avouer que ça a l’avantage de préserver un peu Fucked Up d’une tendance à l’Hüsker Düisme. Cela dit, sur « Cicada », l’élégante mélodie vocale confère au morceau une ascendance directe avec le grand frère, d’autant que la guitare est jouée façon Bob Mould. Mais là, ce n’est pas Abraham qui chante, c’est le guitariste, Mike Haliechuk. Ce nouvel album s’inscrit, dans l’ensemble, dans une veine Hot Water Music/Leatherface/Avail, pour la voix de Damian Abraham tout d’abord, pour l’esprit ensuite, et surtout, pour le fond et l’emballage final. Si on isole la voix pour n’écouter que l’instrumentation, on s’aperçoit que Fucked Up est de plus en plus enclin à un rock domestique. Dès le deuxième titre, le bien nommé « I Think I Might Be Weird », on surprend des intentions à la R.E.M., et nous ne serions pas surpris de voir le groupe poursuivre dans cette voie à l’avenir. Surtout qu’il récidive avec un « Lords of Kensington » à fort tempérament R.E.Miste. Fucked Up est plein de ressources et n’a pas fini de nous surprendre. Le gimmick guitare de « Broken Little Boys » est un véritable accroche-cœur qui pourrait propulser Fucked Up sous le feu des projecteurs avec un côté pop et des velléités punks. Ce gimmick devrait, si la logique est respectée, connaître un destin similaire à celui de « Seven Nation Army » et permettre à Fucked Up de refaire les coups d’Offspring et de White Stripes par le passé. La direction artistique de « Nothing’s Immortal » est clairement tournée vers la pop à la R.E.M. si n’était la voix de Damian Abraham qui fait pourtant l’effort de vocaliser, à la manière de Franck Stubbs (Leatherface) tout de même. Pas sûr que ça convienne aux oreilles les plus chastes, même celles prétendant écouter du
« rock quoi » ! Si on retrouve des morceaux plus power pop punk comme « One Day » qui donne le titre à l’album, on sent que Fucked Up tend à élargir son audience. Partir de Hüsker Dü pour se rapprocher de R.E.M., ça aurait du sens. Hüsker Dü et R.E.M. étant les deux groupes américains issus du milieu indépendant à avoir chamboulé l’ordre établi dans l’industrie musicale aux Etats-Unis dans les années 80. One Day est un somptueux album, le premier d’une longue lignée qui conduira Fucked Up au sommet, encore qu’avec un patronyme pareil, il risque d’y avoir quelques blocages…

Fucked Up One Day Merge Records/Modulor

Face A

Found
I Think I Might Be Weird
Huge New Her
Lords of Kensington
Broken Little Boys

Face B

Nothing’s Immortal
Falling Right Under
One Day
Cicada
Roar



Album disponible sur Apple Music, Bandcamp, Qobuz, Spotify & Tidal,
mais aussi et surtout, chez tous les bons disquaires indé’ !


Patrick Foulhoux

Ancien directeur artistique de Spliff Records, Pyromane Records, activiste notoire, fauteur de troubles patenté, journaliste rock au sang chaud, spécialisé dans les styles réputés “hors normes” pour de nombreux magazines (Rolling Stone, Punk Rawk, Violence, Dig It, Kérosène, Abus Dangereux, Rock Sound…), Patrick Foulhoux est un drôle de zèbre.

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