P.O.S. « Chill, dummy »

Chill, Dummy
En 2017, on ne peut pas dire que les rappeurs comme P.O.S. courent les rues. Tel un électron libre de l’Indie Hip-Hop, considéré par beaucoup comme un Punk philosophe, Stefon « P.O.S. » Alexander distille son style à part depuis bientôt quinze ans -en solo, ou au sein de son groupe Doomtree– alors que sort Chill, dummy, son cinquième album.

Pour Alexander, ces dernières années n’ont pas été une partie d’plaisir. Fin 2012, alors que son précédent disque, We Don’t Even Live Here (chez Rhymesayers) vient à peine de voir le jour, le rappeur doit faire face à de sérieux problèmes de santé, et se voit forcé d’annuler la tournée qui s’ensuit. Une transplantation de rein et quelques longs mois de convalescence plus tard assortie à de longues phases d’isolement, ont permis de poser les fondations de ce qui est devenu Chill, dummy, son album le plus noir et introspectif à ce jour. Sur un flow auquel le rappeur nous avait habitué, P.O.S. explore avec toujours autant de hargne les problèmes de société et ce, sans naïveté aucune, à l’heure où son Amérique natale ne semble jamais avoir été autant frappée par des crimes racistes.
Mais là où ce cinquième album se veut plus personnel, c’est lorsqu’Alexander aborde indirectement ces longues phases d’hospitalisation qui ont inévitablement mis en danger sa carrière de emcee, comme sa vie de famille. Musicien D.I.Y. n’est définitivement pas le job idéal aux U.S.A!
Comme sur ses précédents opus, il n’hésite pas à taper sur les nombreux dysfonctionnements qui rongent son pays et aborde tour à tour le mouvement Black Lives Matter, les meurtre d’Eric Garner et de Mike Brown ou la présidence d’Obama. Si Chill, dummy est sans conteste son album le plus noir, le plus oppressant, P.O.S. réussit pour la première fois à aborder des sujets sombres sur des titres au tempo plus…chill (« Thieves/King » ou « Gravedigger »). Coté collaboration, le casting de featuring est plus ou moins surprenant, on y retrouve des habitués (les potes Astronautalis, Justin Vernon ou Lazerbeak) et l’inattendu Kathleen Hanna (Bikini Kill, Le Tigre, Julie Ruin), une nouvelle façon pour le emcee de brouiller les pistes en mêlant toutes ses influences -qu’elles soient Noise, Punk voir même Pop- pour finalement façonner sa propre vision d’un Hip-Hop riche et original.

L’album se termine sur une pièce maitresse, qui résume l’atmosphère du disque à elle seule, un titre qui restera l’un des plus marquant de sa carrière: « sleepdrone/superposition« , un morceau tendu et écorché à vif, sur lequel P.O.S. rappe avec ses tripes pendant près de 9 minutes.

Alors que le emcee se positionne plus que jamais avec ce nouvel LP comme le meilleur rappeur indie le plus méconnu -pourtant présent depuis bien plus longtemps que Run The Jewels ou Death GripsChill, dummy arrive comme le disque honnête, amer et cathartique d’un rappeur conscient, qui n’hésite à aucun moment à soulever les nombreux problèmes qui déchirent son pays. Son Black Album en quelques sorte…mais surtout une excellente manière de résumer quinze années de carrière D.I.Y.

P.O.S. Chill, dummy Doomtree Records/Speech Development

TRACKLIST:

Side A

Born a Snake
Wearing a Bear
Bully (Ft. Moncelas Boston & Rapper Hooks)

Side B

Faded (Ft. Lady Midnight)
Pieces/Ruins (Ft. Dwynell Roland & Busdriver)
Get Ate (Ft. Gerald)

Side C

Roddy Piper (Ft. Moncelas Boston)
Thieves/Kings
Infinite Scroll (Ft. Open Mike Eagle & Manchita)

Side D

Lanes
Gravedigger (Ft. Angelenah)
sleepdrone/superposition (Ft. Hard_R, Allan Kingdom, Astronautalis, Kathtleen Hannah, Eric Mayson, Lydia Liza, Lizzo & Nicholas L. Perez)



Album également dispo’ en écoute sur Spotify et Bandcamp.











Stéphane Pinguet

Disquaire indépendant aigri mais passionné, amateur de musique, cinéma, littérature et bandes dessinées en tous genres.

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