Thee Oh Sees « An Odd Entrances »

An Odd Entrances
Suite au très académique A Weird Exits sorti cet été, Thee Oh Sees nous livre An Odd Entrances pour la conclure dans un effet de miroir plutôt évident. Défini comme un « appendice » au premier album, celui-ci peut aussi se voir — enfin, s’entendre — comme un frère jumeau siamois maléfique sachant que ces deux albums ont été enregistrés lors d’une même session. Les séparer chirurgicalement à la naissance pour en faire deux entités propres, était-ce une bonne idée ? Let Thee oh Sees
Par où t’es rentré, je t’ai pas vu sortir.

Ce qui frappe d’entrée est l’esprit de « session » qui traverse de part en part An Odd Entrances. Un peu comme si les morceaux qui y figurent faisaient partie de pauses (ré)créatives que le groupe se serait accordé pendant l’enregistrement de A Weird Exits. Il y a un certain souffle de liberté et d’expérimentation qui parcourt cet album jumeau où, pour autant, rien n’est laissé au hasard. « You Will Find it Here », pure ballade spatiale incantatoire, introduit le manifeste psychédélique de l’album, appuyé par des paroles faisant plutôt ouvertement référence à une gloire musicale et un mouvement passé qui ne cessent d’inspirer :

Bend the knee and look at the photograph
View a life that has sadly come to pass
Read the walls, all sprayed with the story
Stand on rocks that once were buildings
Feel the grass reaching up through your fingers
Hold your love while it still lingers
Laugh and cry in allotted time now
Look to the sky before you fade away

« The Poem » et « Jammed Exit » explorent ou revisitent dans la foulée deux registres soniques qui feront le bonheur d’amateurs de substances psychotropes old school, notamment celles qui vont bien avec les violons électroniques ou la flute traversière (au choix). « At the End, on the Stairs » et « Unwrap the Fiend Pt. 1 » nous font revenir sur un territoire plus fuzz-amilier et garagesque. On ne peut, d’ailleurs, que tiquer sur le second titre, manifestement échappé de A Weird Exits où l’on retrouve « Unwrap the Fiend Pt. 2 » qui, lui, aurait pu se retrouver sur An Odd Entrances. Qu’ils sont taquins ces californiens…
« Nervous Tech (Nah John) » vient conclure l’album et, pour ainsi dire, boucler la boucle. Pour le coup si ses huit minutes ne sont pas le pur produit d’une session alors le principe même de session n’existe pas. Véritable monument de Fuzz et de rythmique — torrides, lancinantes, explosives, corrosives… —, il illustre à la perfection la voie que le groupe a pris ces deux dernières années et l’essence musicale de ce lineup.

Et maintenant, que vais-je faire ?

En fin de compte il est tout de même difficile de parler de An Odd Entrances sans prendre en compte A Weird Exits, tant ce sont les deux faces d’une même pièce. Alors que le premier porte une sorte de classicisme à travers des morceaux plutôt calibrés et bordés, le second donne dans la roue libre, dans une certaine gratuité. Singulièrement, il marque l’aboutissement d’un goût pressenti pour le psychédélisme et une part belle laissée à l’instinct, à l’instant. Car il faut bien se rappeler que Thee Oh Sees va maintenant sur ses dix ans d’existence et que le prolifique/maléfique John Dwyer lui a déjà a déjà fait vivre différentes phases à travers différents lineups. Une séquence vient, d’ailleurs, probablement de se terminer car un des deux batteurs (Ryan Moutinho) a annoncé sur Instagram qu’il partait vers d’autres horizons en pleine tournée. Cela laisse présager que la dynamique (ou la masse de travail ou l’exigence ou tout cela en même temps) que porte ce possédé de John n’est pas simple à suivre. Mais cet éternel mouvement est certainement la clé qui ouvre, avec et dans le même temps, de multiples portes.

Thee Oh Sees An Odd Entrances Castle Face/Differ-Ant
Site web de Thee Oh Sees, de Castle Face Records et de Differ-Ant.

TRACKLIST:

Side A

You Will Find It Here
The Poem
Jammed Exit

Side B

At The End, On The Stairs
Unwrap The Fiend, Pt. 1
Nervous Tech (Nah John)



Critique du concert du groupe donné
à La Coopérative de Mai en mai 2017.

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Rodolphe Canale

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